I. NAISSANCE

De Atlas Etnográfico de Vasconia
Aller à : navigation, rechercher

Autres langues :
Inglés • ‎Español • ‎Euskera • ‎Francés

Provenance des enfants selon les croyances enfantines

Jusqu’à relativement peu longtemps, les parents offraient différentes versions à leurs enfants qui les questionnaient sur leur provenance. Ces versions variaient selon les lieux, et parfois selon les familles d’un même village. Toutes avaient pour but de détourner la curiosité des enfants sur la procréation. On leur expliquait qu’ils avaient été apportés par la cigogne ou par une personne : l’accoucheuse, la sage-femme, l’infirmier, le médecin ou le propre père ; de même, qu’ils avaient été achetés par leurs parents ou que le père les avait trouvés par hasard dans les endroits les plus divers.

La cigogne. Paris

La croyance enfantine la plus amplement répandue a été celle des enfants ramenés de Paris par une cigogne, zikoina.

Généralement, elle les apportait suspendus au bec (Amézaga de Zuya-A), enveloppés dans un linge noué (Artziniega, Moreda-A) ou mis dans une petite boîte (Busturia-B), un panier (Artziniega-A) ou un petit panier allongé en osier également pendu au bec (Moreda­A).

Apportés par l’accoucheuse ou le médecin

Plus ancienne que la croyance enfantine en la cigogne semble être celle qui affirme que c’est l’accoucheuse qui apporte les enfants. Dans les lieux où les deux traditions ont été recueillies, cette dernière était plus ancienne que la première. Le rôle de l’accoucheuse en tant que porteuse des enfants a aussi été attribué au reste du personnel sanitaire chargé de s’occuper des accouchements : la sage-femme, l’infirmier et le médecin.

L’accouchement

De la naissance à la maison à la naissance à l’hôpital

Autrefois, l’accouchement avait lieu dans la maison où vivait la femme enceinte, qui recevait l’aide de ses parentes et de ses voisines, ou du personnel spécialisé, dans son propre lit. Aux alentours des années cinquante et soixante de ce siècle, il a commencé à connaître un profond bouleversement à partir du déplacement de la parturiente vers la ville proche, où il existait des cliniques spécialisés ou d’autres types de centres de soins où elle recevait une meilleure attention.

Aides à l’accouchement

Tout le long du présent siècle, nous avons assisté à d’importantes transformations en ce qui concerne les personnes chargées de faciliter l’accouchement. L’accoucheuse traditionnelle, qui agissait en fonction de son savoir empirique, a laissé progressivement la place à des personnes formées et de plus en plus spécialisées dans cette tâche. Cette modification a entraîné pour les femmes une perte de maîtrise sur une expérience considérée presque de son domaine exclusif au profit d’équipes professionnelles souvent dirigées par des hommes.

Soins à l’accouchée

Une fois l’accouchement terminé, la sage-femme lavait l’accouchée avec de l’eau tiède (Ezkio-G ; Moreda-A). Pour cela, à Monreal (N), elles utilisaient des morceaux de draps en guise de serviettes. Après l’avoir lavée, elle changeait son linge et la literie (Bidegoian, Zerain-G). À Berastegi (G), on sortait à cette occasion les plus beaux draps et dessus-de-lit.

Annonce de la naissance

Après la naissance de l’enfant, la personne qui annonçait la nouvelle aux membres de la maison était celle chargée de s’occuper de l’accouchement, à savoir, traditionnellement, l’accoucheuse (Artziniega, Moreda, Valdegovía-A) ou son assistante (Amézaga de Zuya, Artziniega, Gamboa, Valdegovía-A).

Attentions au nouveau-né

Premiers soins

Le premier geste réalisé dès la naissance de l’enfant consistait à le renverser jusqu’à ce qu’il commence à pleurer et, sinon, à lui donner de petits coups sur les fesses pour faire démarrer le pleur et qu’il commence à respirer.

Langer le bébé

Il était très courant autrefois de langer le ventre des enfants à l’aide de ceintures rigides. On donnait à cette pratique un but préventif, mais elle servait aussi à corriger des problèmes comme les hernies.

Comme nous l’avons déjà vu précédemment, les langes étaient également utilisés pendant les premiers jours de vie pour protéger le nombril et tenir les linges qui étaient appliqués dessus pendant qu’il cicatrisait et guérissait.

L’allaitement

Ainsi qu’il a été recueilli dans certains villages, pendant les premières heures, et parfois même pendant plus longtemps, l’enfant ne recevait que de l’eau, de l’eau sucrée ou un peu de miel avec lequel on enduisait ses lèvres pour stimuler le réflexe de succion.

Donner le sein

Autrefois, le lait maternel était le seul aliment du nouveau-né jusqu’à une étape très avancée de son développement.

La nourrice

Quand un enfant ne pouvait pas être allaité par sa mère, parce que celle-ci n’avait pas de lait ou parce qu’elle était malade ou décédée, on s’adressait à des femmes de confiance qui se trouvaient également en période d’allaitement et qui avaient suffisamment de lait pour deux enfants, ou à des femmes qui avaient perdu leur enfant. Cette pratique était appelée à Sangüesa (N) "dar media leche" (donner la moitié du lait).

Dangers pour la mère allaitante. "Coger pelo"

Pendant la période d’allaitement la mère faisait très attention à ne pas prendre froid à la poitrine. À Garde (N), cette affection était appelée "coger pelo" (attraper du poil). À Amézaga de Zuya (A), l’accent était mis sur le soin qu’elle devait avoir pendant cette période, surtout pour ne pas prendre froid, car sinon la poitrine "devenait dure" et l’enfant ne pouvait pas téter.

Prolongation de l’allaitement

Antan, la période d’allaitement pouvait durer jusqu’à deux ou trois ans ; et dans certains villages, on se souvient d’allaitements qui ont duré plus longtemps.

Quoi qu’il en soit, il se prolongeait en général jusqu’à ce que la mère soit de nouveau enceinte, moment où il était interrompu car on considérait que le lait d’une femme enceinte n’était pas bon.

Début de l’alimentation normale

Autrefois, au fur et à mesure que l’enfant grandissait, à partir de neuf mois ou de l’année, on complétait l’allaitement avec d’autres aliments comme une crème de farine de blé grillée avec du lait et du sucre, ahia dans la zone bascophone ; une soupe de pain au lait ; une soupe à l’ail, baratxuri-zopea au Gipuzkoa ; une soupe de farine grillée, appelée "sopitas del Niño Jesús" à Sangüesa (N) ; un bouillon de haricots, de la purée, des légumes, un œuf à la coque, etc. Quand il commençait à mâcher, on introduisait de la viande et du poisson finement découpé.

Inhumation des bébés non baptisés

Jusqu’à l’orée de ce siècle, dans certains villages a perduré la pratique d’inhumer les enfants mort-nés, ou décédés avant d’avoir pu être baptisés, sous l’avant-toit de la maison ou dans un terrain proche d’elle.

Sous l’avant-toit de la maison

En Biscaye et au Gipuzkoa, l’inhumation s’effectuait autour de la maison le long d’un mur gouttereau[1]. Cette pratique reste encore présente dans la mémoire des informateurs de certaines localités étudiées.

Dans les limbes du cimetière

Les enfants morts sans avoir été baptisés allaient aux limbes, selon la croyance populaire induite par l’Église ; cette destination, comme l’expliquent certains informateurs, est "un lieu où l’on ne souffre pas, on ne pâtit pas et on ne connaît pas de joies".


  1. José Miguel de BARANDIARAN. Estelas funerarias del País Vasco. San Sebastián, 1970, p. 39.