VIII. CULTURE DU LIN ET DU CHANVRE

Esta página es una versión traducida de la página CULTIVO DE LINO Y CAÑAMO. La traducción está completa al 100 %.

Otros idiomas:
Inglés • ‎Español • ‎Euskera • ‎Francés

Contenido de esta página

Culture du lin autrefois

Le lin est l'une des plantes textiles les plus anciennes en Europe puisqu'elle est utilisée depuis le Néolithique[1]. En Euskal Herria, il n'existe aucun mythe relatif à son introduction ou à la période de ses semailles, comme c'est le cas avec le blé ou avec le maïs.

Autrefois, le lin jouissait d'une grande estime et quand les grands propriétaires louaient leurs terres ils se réservaient une parcelle pour cultiver leur lin. Le bail des terres louées se payait également en mesures de graines de lin.

Au Baztan (N), selon Azkue, la maîtresse de maison, à côté de son salaire annuel, remettait à sa servante deux boisseaux de graines de lin pour qu'elle puisse préparer ensuite son trousseau. Selon ce même auteur, dans plusieurs vallées de Navarre et plus encore en Soule les femmes commençaient toutes jeunes à préparer leur trousseau. Pour cela, elles recevaient de leurs parents un morceau de terrain pour y semer du lin. Dès lors, la jeune fille apprenait à filer son lin[2].

Le lin dans le paysage agraire

Tant les champs de lin que les potagers constituaient les parcelles les plus délicates de l'espace agricole, les plus chères, dans sa conception de la propriété privée, au cœur du paysan, les plus incorporées à son patrimoine familial[3].

Le lin s'obtenait des semis domestiques : parfois l'excédent était vendu, mais dans la plupart des cas toute la récolte était à usage exclusivement domestique. Après les semailles et la récolte, le processus de transformation de la plante en fibres textiles se déroulait dans la propre ferme.

Terrains de culture

Le lin exige pour être semé une bonne terre, mais plutôt dure, argileuse, buztin-lurra, car dans les sols mous, il grandit trop et tend à se coucher. Les terres préférables étaient celles de premier labour, luberriak.

Ce nouveau terrain destiné au semis de lin était aussi appelé labakia et izetea. Il se travaillait à la houe (izeta-atxurra) en éliminant les adventices et en les brûlant après les avoir mises en tas. Ensuite le sol était retourné à la houe à deux dents. Le nouveau défrichage exigeait généralement deux passes de houe car il fallait remuer la terre et la démotter, puis attendre le beau temps pour semer. Ensuite elle était fertilisée en répandant dessus du fumier éparpillé à la fourche[4].

Processus d'élaboration

Dans sa Corografía de Guipúzcoa écrite au XVIIIe siècle, Larramendi signale que tout le travail du lin était pris en charge par les femmes : “Le lin et toute sa manufacture sont l'affaire des femmes. Ce sont elles qui préparent la terre, la fument et même s'il en manque pour d'autres travaux il ne leur manquera jamais de fumier pour leur lin. Ce sont elles qui le sèment et le sarclent, et elles aussi qui l'arrachent quand il est à point”[5].

Traitement des fibres

L'automne était la meilleure saison pour entreprendre à la maison les travaux du lin après avoir semé les navets et ramassé en montagne la fougère.

Les travaux domestiques successifs pour obtenir la fibre de lin étaient réservés aux femmes et s'exécutaient dans le cadre de la communauté vicinale comme l'attestent les témoignages recueillis dans les différents territoires.

À défaut de journées ensoleillées, les plantes étaient mises à sécher dans le four à pain. On mettait ainsi à profit la chaleur du four après la cuisson du pain. Si cette dernière avait lieu comme d'ordinaire le matin, les pailles de lin étaient introduites dans l'après-midi, une fois que le four était tiède. Ce procédé était également utilisé pour le grain de maïs récemment ramassé.

Filage

Le travail de filage, harigintza ou gorugintza, s'effectuait en groupe et généralement pendant les soirées d'hiver ; c'était une composante de la vie sociale des villages. Le jour indiqué, les femmes du voisinage se réunissaient dans l'une des maisons. Au milieu de conversations animées et à la lumière de la chandelle, elles se consacraient jusqu'à l'entrée de la nuit à élaborer le fil de lin, goruetan (Zeanuri-B, Ataun, Zerain-G), ardazketa à Urdiain (N).

Les instruments qui étaient utilisés pour cette tâche étaient la quenouille, gorue (Zeanuri, Dima-B), liñaie (Ataun-G), lilaja, (Urdiain-N) et le fuseau, ardatza, qui étaient apportés par chaque fileuse.

Blanchissement

À Zeanuri (B), ces écheveaux de fil brut étaient soumis à plusieurs lessivages pour que le fil se ramollisse, bigundu, et prenne sa couleur blanche, zuritu.

La lessive, bogadea, était une opération domestique de lavage du linge blanc, erropa zurie: draps, izerak; camisoles, kamisek; housses de traversin, almuda-azalak; etc. Ordinairement, la lessive avait lieu tous les quinze jours.

On utilisait pour cette opération un grand récipient en forme de demi-baril, tinekue, confectionné à partir de planches tenues par deux ou trois cerceaux métalliques. Ouvert par le haut, il disposait au bas du flanc d'un trou pour évacuer l'eau. Cette sortie se bouchait avec un chiffon, sorkie.

À Ataun (G), le blanchissement du fil noué en écheveaux, matazak, s'effectuait au moyen de lessivages. Deux baquets étaient utilisés pour cette opération : arratzalde et tiña. Le baquet, arratzalde, était construit avec l'écorce d'arbres, ordinairement de jeunes tilleuls écorcés à la fin juin.

À Urdiain (N), la lessive était appelée lixiba. Les écheveaux étaient mis à cuire en filtrant l'eau chaude entre la cendre, qui faisait fonction de détergent. Ils faisaient l'objet de trois lessives, puis étaient rincés à l'eau. Si le ton écru persistait, il était corrigé par lavages successifs. Une fois cuits et lavés avec de l'eau propre, les écheveaux étaient mis à sécher dans les prés ou dans les aires afin d'améliorer encore leur blancheur[6].

Le chanvre

La plante de chanvre peut atteindre quelque deux mètres de haut. Sa fibre était autrefois utilisée pour la confection de certains tissus et ses graines pour alimenter les volailles et pour obtenir de l'huile. Il se semait en avril et s'arrosait plusieurs fois. En septembre, la plante était prête à être arrachée. On laissait sécher les pailles à même le sol puis, avoir recueilli le chènevis, elles passaient au rouissage et au teillage pour en dégager les fibres.

Le sparte

Le sparte ou alfa ne se semait pas. Cette plante sauvage se ramassait en août. Les touffes étaient mises à sécher pendant 20 jours, puis elles étaient battues et écrasées avec un maillet de bois. Une fois écrasées, elles étaient mouillées pour obtenir une fibre qui était épaisse et dure. Le sparte se tressait à la main pour obtenir des cordages et des semelles d'espadrilles. Mais ces semelles étaient de moindre qualité que celles confectionnées avec du chanvre. Son aspérité a aussi valu au sparte d'être utilisé pour nettoyer les sols et les récipients.


  1. Telesforo de ARAZANDI. Folklore y costumbres de España. Tome I. Barcelona: 1911-1925, p. 355.
  2. Resurrección M.ª de AZKUE. Euskalerriaren Yakintza. Tome I. Bilbao: 1989, pp. 272 et 274.
  3. Salvador MENSUA. La Navarra Media Oriental. Zaragoza: 1960, pp. 101-102.
  4. Juan Antonio MOGUEL. Peru Abarca. Bilbao : 1978, p. 94.
  5. Manuel de LARRAMENDI. Corografía ó descripción general de la muy noble y leal provincia de Guipúzcoa. Barcelona: 1882, p. 59.
  6. Cette position de la quenouille est décrite dans le vieux diction basque : Gorua garraian, gogua kirolan : la quenouille à la ceinture (mais) la tête au jeu.