Diferencia entre revisiones de «Consideraciones generales sobre la agricultura Agricultura en vasconia/fr»

(Actualizando para coincidir con nueva versión de la página fuente)
m (Texto reemplazado: «Labayru Fundazioa: fondo» por «Labayru Fundazioa: Fondo»)
 
(No se muestra una edición intermedia del mismo usuario)
Línea 22: Línea 22:
 
La main-d’œuvre, et l’importance de la participation de tous les membres de la famille aux travaux agricoles, indépendamment de l’âge ou du sexe, la collaboration entre voisins et, sur le versant méditerranéen, l’embauche de journaliers, surtout pendant la période des récoltes en raison de leur extension et de la vitesse à laquelle elles devaient être réalisées, sont traitées, sans oublier l’importance de la force animale en un temps où les machines telles que celles que nous connaissons aujourd’hui n’avaient pas encore fait leur apparition.
 
La main-d’œuvre, et l’importance de la participation de tous les membres de la famille aux travaux agricoles, indépendamment de l’âge ou du sexe, la collaboration entre voisins et, sur le versant méditerranéen, l’embauche de journaliers, surtout pendant la période des récoltes en raison de leur extension et de la vitesse à laquelle elles devaient être réalisées, sont traitées, sans oublier l’importance de la force animale en un temps où les machines telles que celles que nous connaissons aujourd’hui n’avaient pas encore fait leur apparition.
  
<div class="mw-translate-fuzzy">
+
[[File:8.1_Faneuse_1896._Oleo_de_Emile_Claus.png|center|500px|Faneuse, 1896. Óleo de Émile Claus. Fuente: ''Émile Claus (1849-1924)''. Paris: Bibliothèque de l Image, 2013, p. 46.]]
[[File:8.1_Faneuse_1896._Oleo_de_Emile_Claus.png|center|600px|Faneuse, 1896. Óleo de Émile Claus. Fuente: ''Émile Claus'' (1849-1924). Paris: Bibliothèque de l Image, 2013, p. 46.]]
 
</div>
 
  
 
Un chapitre est consacré au transport animal, et surtout à la charrette à bœufs en raison de son importance, ainsi qu’au joug et à tous les compléments nécessaires pour atteler la paire. Le dernier chapitre de ce bloc aborde la mécanisation de l’agriculture et les changements que les machines modernes ont entraînés dans l’agriculture.
 
Un chapitre est consacré au transport animal, et surtout à la charrette à bœufs en raison de son importance, ainsi qu’au joug et à tous les compléments nécessaires pour atteler la paire. Le dernier chapitre de ce bloc aborde la mécanisation de l’agriculture et les changements que les machines modernes ont entraînés dans l’agriculture.
Línea 46: Línea 44:
 
Compte tenu de l’âge des informateurs et du fait qu’une partie de l’information a été recueillie il y a déjà quelques décennies, nous évoquons principalement une agriculture qui va de la fin du XIXe siècle au milieu du XXe.
 
Compte tenu de l’âge des informateurs et du fait qu’une partie de l’information a été recueillie il y a déjà quelques décennies, nous évoquons principalement une agriculture qui va de la fin du XIXe siècle au milieu du XXe.
  
[[File:8.3_Laietan_Zeanurin_(B)_1920.png|center|600px|Laietan Zeanurin (B), 1920. Fuente: Archivo Fotográfico Labayru Fundazioa: fondo Felipe Manterola.]]
+
[[File:8.3_Laietan_Zeanurin_(B)_1920.png|center|600px|Laietan Zeanurin (B), 1920. Fuente: Archivo Fotográfico Labayru Fundazioa: Fondo Felipe Manterola.]]
  
 
Cette agriculture, à caractère familial et qui concernait tous les membres de la ferme, indépendamment de l’âge et du sexe, se caractérisait par l’autosuffisance, ou y tendait, tant que cela a été possible.
 
Cette agriculture, à caractère familial et qui concernait tous les membres de la ferme, indépendamment de l’âge et du sexe, se caractérisait par l’autosuffisance, ou y tendait, tant que cela a été possible.

Revisión actual del 08:42 11 sep 2019

Otros idiomas:
Inglés • ‎Español • ‎Euskera • ‎Francés

Contenido de esta página

Contenu de l’ouvrage

Ce tome consacré à l’agriculture traditionnelle en Vasconia aborde une bonne part des aspects en rapport avec cette activité, au-delà de la culture de la terre proprement dite.

Il commence par une révision des différents paysages agraires qui forment le territoire de Vasconia, avec les cultures propres à chaque versant, le méditerranéen, nettement agricole, et le versant atlantique.

De plus, il recueille les connaissances sur les types de terres arables et leurs caractéristiques, la dimension des parcelles et leur situation et séparation.

En ce qui concerne l’agriculture à proprement parler, plusieurs sujets sont traités comme les périodes de culture, l’influence attribuée à la lune, la distribution des cultures dans les différents types de parcelles, la rotation de celles-ci, le calendrier agricole et la sélection, conservation et préparation des semences et des pépinières ; de même, il se penche sur le défrichage et la préparation de parcelles déjà cultivées, l’utilisation traditionnelle des engrais organiques, les amendements à la chaux et l’introduction des engrais chimiques.

Un autre chapitre analyse la diversité des cultures observable dans le territoire étudié, ainsi que sur le semis ou la plantation des différentes espèces végétales, essentiellement regroupées en céréales, légumes secs et légumes verts. Une distinction est faite entre les cultures destinées à l’alimentation humaine et celles pour le bétail, dans la mesure où, dans la société traditionnelle, rien n’était gaspillé et que les restes des aliments pour la consommation humaine ainsi que les déchets de leur préparation servaient à nourrir les animaux domestiques. Les cultures dites industrielles, dont le cas le plus paradigmatique est la betterave à sucre, ne sont pas pour autant négligées. Par ailleurs sont aussi abordés les soins donnés à toutes ces cultures pour en garantir la réussite. Ensuite, un autre chapitre traite des récoltes et des méthodes traditionnelles de conservation, et notamment des opérations de fauchage des céréales, suivies du battage et du vannage du grain.

Un chapitre est consacré à l’herbe, une production plus propre du versant atlantique et de la zone de transition avec le versant méditerranéen, au défrichement et à l’entretien des prés et à la mise à profit des herbages par le pacage, l’affouragement en vert et la fenaison. Il se termine sur les changements intervenus à partir de l’introduction progressive des machines.

En ce qui concerne les arbres fruitiers, dans un premier chapitre sont abordées les différences dans leur culture, conditionnées par les différents climats du territoire, la façon d’effectuer les plantations, la greffe de nouvelles variétés, le soin des arbres, et notamment la taille, ainsi que la récolte et la valorisation des fruits obtenus. L’olivier et la vigne méritent un chapitre à part en raison de l’importance qui est la leur dans la zone méridionale de Vasconia. Cet ensemble de chapitres sur les arbres fruitiers se clôt sur un autre consacré à la production d’huile et de vin sur le versant méditerranéen et de txakoli et de cidre sur le versant atlantique.

Le dernier des chapitres expressément consacrés à la culture est celui qui étudie deux productions d’antan, à savoir le lin et le chanvre, intimement liées à l’économie d’autosuffisance qui les caractérisait.

L’ensemble de chapitres suivant s’ouvre sur une ample évocation du mobilier agricole traditionnel, et en particulier des nombreux appareils et outils qui étaient autrefois nécessaires pour exercer cette activité. À nouveau se manifestent les caractéristiques d’une économie d’autarcie avec la constatation que leur fabrication a été majoritairement domestique ou locale. Il est aussi fait état du vieux système de mesures, dont certaines ont perduré jusqu’à nos jours.

La main-d’œuvre, et l’importance de la participation de tous les membres de la famille aux travaux agricoles, indépendamment de l’âge ou du sexe, la collaboration entre voisins et, sur le versant méditerranéen, l’embauche de journaliers, surtout pendant la période des récoltes en raison de leur extension et de la vitesse à laquelle elles devaient être réalisées, sont traitées, sans oublier l’importance de la force animale en un temps où les machines telles que celles que nous connaissons aujourd’hui n’avaient pas encore fait leur apparition.

Faneuse, 1896. Óleo de Émile Claus. Fuente: Émile Claus (1849-1924). Paris: Bibliothèque de l Image, 2013, p. 46.

Un chapitre est consacré au transport animal, et surtout à la charrette à bœufs en raison de son importance, ainsi qu’au joug et à tous les compléments nécessaires pour atteler la paire. Le dernier chapitre de ce bloc aborde la mécanisation de l’agriculture et les changements que les machines modernes ont entraînés dans l’agriculture.

Un chapitre supplémentaire porte sur la valorisation de la production propre et sur le commerce agricole : achat de semences et de plantes, d’engrais et d’outils, organisation de marchés et de foires agricoles, etc.

Et un autre encore sur le régime de propriété agraire : propriétaires qui exploitent directement leurs terres ou qui le font par l’intermédiaire de locataires, montant des baux, époques de paiement et si ce dernier était réglé en nature ou en espèces.

Le volume se conclut sur les croyances et les rites en rapport autrefois avec l’agriculture, la protection des semailles, la bénédiction des semences et des champs, les sortilèges contre les orages, les prières publiques à la divinité et aux saints protecteurs des récoltes.

Ce tome complète un autre précédent consacré à l’élevage et au pastoralisme, compte tenu des liens inextricables qui existaient entre toutes ces activités dans la ferme d’antan, avant que ne débute la spécialisation progressive au cours de la seconde moitié du XXe siècle dernier. Ce phénomène a débouché, dans une partie du territoire étudié, à savoir le versant méditerranéen, sur une activité plus nettement agricole, tandis que sur l’autre, le versant atlantique, l’élevage a fini par prévaloir.

L’activité agricole nous transporte dans des périodes lointaines de notre passé d’une façon qui nous rappelle ce que nous avons déjà dit pour le pastoralisme.

Deux millénaires plus tôt, Pline établissait une distinction entre le Vasconum saltus et le Vasconum ager, le premier humide et boisé, le second parsemé de champs de céréales et de vignes, correspondant respectivement aux régions humides et sèches de Vasconia. Si dans le tome consacré à l’élevage et au pastoralisme a prévalu le territoire occupant le versant le plus humide, dans celui-ci c’est le versant le plus sec et agricole qui domine, mais sans oublier que dans la société traditionnelle, et pour une bonne part dans le secteur primaire qui survit encore, aussi bien l’élevage que l’agriculture sont présents dans toute la géographie rurale de Vasconia.

L’agriculture traditionnelle

La description consacrée à l’agriculture qui apparaît dans ce tome de l’Atlas ethnographique de Vasconia constitue une révision des évolutions survenues essentiellement tout le long du XXe siècle. Toutefois, comme le lecteur pourra le constater en parcourant les différents chapitres de cet ouvrage, une préférence marquée est accordée aux pratiques qui étaient connues avant la mécanisation intense qui s’est produite à partir des années 1960. Pour autant, l’information recueillie ne fait pas l’impasse sur l’agriculture moderne, surtout pratiquée sur le versant méditerranéen du territoire, le plus clairement agricole, où cette activité a connu une transformation qui est allée de pair avec celle qu’ont connue d’autres régions agricoles non seulement de l’État espagnol mais aussi de l’Union Européenne.

Compte tenu de l’âge des informateurs et du fait qu’une partie de l’information a été recueillie il y a déjà quelques décennies, nous évoquons principalement une agriculture qui va de la fin du XIXe siècle au milieu du XXe.

Laietan Zeanurin (B), 1920. Fuente: Archivo Fotográfico Labayru Fundazioa: Fondo Felipe Manterola.

Cette agriculture, à caractère familial et qui concernait tous les membres de la ferme, indépendamment de l’âge et du sexe, se caractérisait par l’autosuffisance, ou y tendait, tant que cela a été possible.

Elle exigeait une connaissance approfondie du milieu naturel où elle se pratiquait : de l’orographie et des caractéristiques édaphologiques du sol, du climat, des saisons et en définitive des cycles saisonniers, des disponibilités en eau, sans oublier tout ce qui concerne chaque culture, de la préparation de la terre et au semis jusqu’à la récolte et au stockage postérieur dans des conditions appropriées pour une bonne conservation.

Ces connaissances ne formaient pas un corpus rigide, mais plutôt un ensemble perméable, le cultivateur de la terre restant ouvert à l’essai de semences et même de techniques nouvelles, mais à partir de l’empirisme qui suppose de vérifier qu’elles fonctionnent. Malgré le mépris que lui a voué la société moderne, ce savoir avait un certain caractère scientifique puisqu’il se fondait sur la méthode essai-erreur. De plus, il était de nature accumulative puisque les connaissances expérimentées par chaque génération s’ajoutaient au corpus reçu et se transféraient à la génération suivante. Grâce à ce savoir accumulé, chaque famille savait en outre quelles étaient les meilleures terres dont elle disposait pour chaque type de culture.

Récolte des betteraves, fin du XIXe siècle. Huile d’Émile Claus. Fuente: Émile Claus (1849-1924). Paris: Bibliothèque de l Image, 2013, p. 35.
Désherbage, late 19th century. Oil painting by Émile Claus. Fuente: Émile Claus (1849-1924). Paris: Bibliothèque de l Image, 2013, p. 43.

Ce savoir s’enracinait dans le lien profond qui s’établissait avec la terre car dans une économie basée sur l’autosuffisance il n’y avait pas d’autre solution que d’être respectueux avec elle, puisque c’est d’elle que dépendait la propre subsistance. De fait, à la différence de ce qui se passe aujourd’hui dans les champs, exposés a l’érosion et à l’accumulation de résidus chimiques, la terre de labour d’antan s’améliorait progressivement au fil des années de travail, la plus appréciée étant celle travaillée depuis de longues générations.

Les textes que nous proposons dans ce volume, fruit du labeur de collecte de nos enquêteurs de terrain auprès de nombreux informateurs répartis sur tout le territoire de Vasconia, permettent une lecture plus ou moins intéressante, mais dont la profondeur n’est souvent perceptible que pour ceux qui ont des connaissances suffisantes en agriculture. Compte tenu de la nature de cet Atlas, notre dessein n’est pas de réaliser une analyse détaillée de certaines pratiques et des savoirs qui sont ici constatés.

Par ailleurs, nous sommes conscients du fait que nous sommes en train de recueillir des données dont le souvenir, quand il fait partie du patrimoine traditionnel, est en voie d’extinction au fur et à mesure que disparaissent les derniers paysans qui les ont connues. De là que parfois l’information que nous recueillons dans ce tome donne l’impression d’être fragmentaire. C’est pour cette même raison que dans un peu plus de dix ans il sera impossible de réunir les données ici constatées.

Les changements dans l’activité agraire

Le processus de spécialisation survenu dans les dernières décennies du XXe siècle dernier a conduit, sur le versant atlantique, à un renforcement du poids de l’élevage, surtout de bovins laitiers, au détriment de l’agriculture traditionnelle, tandis que l’inverse s’est produit sur le versant méditerranéen. Jusqu’alors, les deux activités étaient plus ou moins équilibrées car dans la société traditionnelle l’élevage et l’agriculture étaient intimement liés. Les animaux étaient nécessaires pour réaliser les tâches agricoles (animaux de trait) et leur fumier était la principale source de nutriments pour maintenir la fertilité de la terre. Par ailleurs, une partie de la production obtenue était destinée à alimenter le bétail.

Les changements intervenus dans l’activité agricole ont entraîné une transformation considérable de nos zones rurales qui va bien au-delà de l’activité purement productive.

Dans la société traditionnelle tous les membres de la maisonnée étaient impliqués dans ce travail tant que le permettait l’âge ou l’état de santé. Aujourd’hui, il est de plus en plus fréquent que ce soit une seule personne ou quelques-unes qui se consacrent à ce travail dans chaque ferme, les autres ayant d’autres occupations.

Les tâches agricoles demandaient autrefois une abondante main-d’œuvre, mais cela n’était pas un obstacle car les familles étaient plus nombreuses qu’aujourd’hui. Certains travaux exigeaient en outre plus de mains que celles disponibles à la maison et il était alors fait appel à la collaboration des voisins qui était ensuite rétribuée de la même façon. Ceci contribuait au maintien de la structure de voisinage, laquelle s’est peu à peu brisée alors que prenait de l’importance ce que nous pourrions définir comme un individualisme de chaque maison. La réduction du nombre de travailleurs et cet individualisme sont liés dans une certaine mesure à l’incorporation de machines toujours plus puissantes.

Nombre de fermes des hameaux se sont séparées de l’activité agraire. Les hameaux ont connu un processus progressif d’“urbanisation” et les fermes ont souvent été rénovées selon des critères urbains, au point qu’il s’est produit un curieux processus de convergence entre les ruraux qui aspiraient à avoir une maison avec le “confort” d’un logement urbain, et les nouveaux arrivés de la ville qui ont bâti la leur en essayant de se conformer à leur vision idéale d’une ferme ; le résultat a été que les deux types de maisons montrent une ressemblance suspecte[1].

Autrefois, la stratégie productive était basée sur la diversité : de cultures, de variétés de chaque culture, d’animaux élevés, etc. Aujourd’hui, la spécialisation s’est considérablement développée, non pas tant au niveau des produits cultivés qu’en termes de techniques et de machines employées. Ceci suppose un éloignement progressif de la nature, dans laquelle prime la biodiversité. La spécialisation et la réduction de la diversité engendrent une sorte de “monoculture des idées” qui complique la possibilité d’apprécier d’autres perspectives et formes de production.

Les changements intervenus dans les cultures tout le long du XXe siècle ont entraîné des modifications du paysage à tous les niveaux, avec une perte chromatique sur le versant atlantique, où au vert traditionnel s’associaient l’or des céréales à maturité, le bleu du lin en fleur, le jaune des navets à la fin de l’hiver ou les diverses nuances automnales des forêts autochtones, aujourd’hui remplacés par la monotone uniformité des plantations de pin insignis, avec leur vert sombre, ou le vert plus fade des plantations d’eucalyptus qui dominent le paysage de vastes surfaces de Bizkaia et de Gipuzkoa, reflet de l’échec de l’activité agricole et d’élevage.

La réduction du nombre de fermes qui travaillent la terre dans une zone donnée du territoire implique une série de complications qui, avant, ne se présentaient pas. L’échange de semences se complique et, pire encore, quand une ferme perd une variété il lui est très difficile de la récupérer (en ce sens, autrefois, l’ensemble des fermes qui formaient un voisinage constituait un réservoir de semences). Si elles ont des arbres fruitiers, ceux-ci sont plus attaqués par les oiseaux et au fur et à mesure que les terres agricoles et les pâturages sont abandonnés, souvent remplacés par des plantations forestières, la faune sauvage prolifère et cause de sérieux dégâts aux cultures et aux arbres fruitiers, comme c’est le cas avec les sangliers et les chevreuils.

Il convient d’aborder certains changements avec un certain degré d’ironie. Autrefois, face à des périodes adverses ou de calamités, surtout quand se produisaient de longues sécheresses ou si un orage menaçait de détruire la récolte, les voisins se réunissaient pour implorer un saint local. Les temps ont changé et maintenant cette pratique serait bizarre, mais quelque chose en reste dans le fait que les organisations agraires demandent aux administrations compétentes la concession d’aides pour compenser en partie les pertes de récolte provoquées par des intempéries.

En même temps que sont apparues de nouvelles variétés de semences et de nouvelles cultures, une résistance à certains changements a pu être détectée, ce qui explique pourquoi certaines pratiques et usages ont perduré jusqu’à nos jours. Nous en avons un exemple avec le système traditionnel de poids et mesures dont l’emploi s’est prolongé un siècle et demi après l’adoption officielle du système métrique décimal. Certaines pratiques de culture se maintiennent, peut-être en raison de leur simplicité et de leur efficacité. Qui prend une houe pour semer ou planter une culture horticole le fait essentiellement de la même façon que cela se faisait au cours des siècles passés. Et dans une bonne mesure cette pratique survivra parce que la spécialisation agraire a entraîné une augmentation progressive de la taille et de la complexité des machines qui rend physiquement impossible d’utiliser un tracteur pour un travail qui n’occupe que peu de place, sans entrer dans des considérations d’un autre type comme l’intime satisfaction que procure le travail direct de la terre.

Un autre exemple de la résistance au changement liée à la nécessité d’être autosuffisants est fourni par la survie, en plein XXe siècle, d’appareils et d’outils agricoles de fabrication domestique ou locale intégralement en bois. Un cas surprenant est celui de la charrue avec tous ses composants en bois, décrite plus avant dans deux villages d’Alava, ou les charrettes à bœufs avec toutes leurs pièces de ce matériau.

L’introduction de la technologie moderne dans le milieu rural a été très lente à ses débuts. Ce n’est que peu avant le milieu du XXe siècle que dans la zone étudiée a commencé la “modernisation” à plus grande échelle. Au niveau mondial, c’est à partir de la IIe Guerre mondiale que dans les pays développés la mécanisation intégrale a été appliquée à la production agricole.

Mais cette révolution basée non seulement sur la mécanisation des tâches agricoles mais aussi sur le remembrement, l’emploi d’herbicides et d’engrais chimiques, etc., supposait un modèle porté par l’expansion des villes et assujetti aux économies d’échelle (concentration de ressources, investissements, main-d’œuvre et moyens de production, etc.). Les zones rurales, qui s’étaient maintenues autosuffisantes, sont devenues la principale source de main-d’œuvre et d’aliments de base à bas prix, ce qui a provoqué le dépeuplement rural et la transformation des exploitations agricoles.

En deux ou trois décennies, le panorama rural a substantiellement évolué. La société paysanne qu’ont connue et vécue nos ancêtres, la génération née dans la première moitié du XXe siècle, a disparu ou a changé. Ces paysans ont grandi, se sont mariés et ont formé une famille qui était indispensable à la préservation d’un milieu basé sur la tradition. Mais les enfants de cette génération ont été les témoins de la disparition du bétail, de l’arrivée de tracteurs et machines sophistiquées et de l’abandon des pratiques traditionnelles héritées d’un savoir accumulé pendant des siècles. Et comme si tout cela ne suffisait pas, les agriculteurs qui ont surmonté cette transformation et qui ont maintenant l’âge de céder leur exploitation se trouvent confrontés au fait que leurs enfants ne veulent pas suivre leurs traces car leur travail et leur mode de vie dépend de la ville, quand ils ne s’y sont pas définitivement installés, et en outre ils ne sont pas disposés à se consacrer à une activité si incertaine et pleine de sacrifices.

La situation actuelle

Ces derniers temps, une nouvelle situation inconnue des générations précédentes s’est présentée, à savoir l’apport aux revenus de l’agriculteur d’aides et de subventions. Aujourd’hui, les revenus des agriculteurs ne reposent pas seulement sur le prix de vente de leurs récoltes, mais aussi sur les subventions économiques des administrations publiques, sans lesquelles de nombreuses exploitations agricoles seraient déficitaires.

Dans les décennies finales du XXe siècle dernier et surtout avec l’entrée de l’Espagne dans ce qui s’appelait alors la Communauté Économique Européenne, les agriculteurs ont commencé à bénéficier d’aides et de subventions importantes, tant de la part des exécutifs provinciaux que des gouvernements basque et navarrais, souvent en provenance des ministères de l’Agriculture espagnol et français et surtout des fonds communautaires de l’Union Européenne. Pour cela, les organismes publics correspondants disposent d’une fiche de chaque exploitation agricole où sont indiqués les titulaires, les parcelles, les têtes de bétail et les moyens qu’elle possède, notamment son parc de machines. Ce registre sert à contrôler les exploitations et à piloter les demandes d’aides économiques. La plus couramment demandée et concédée provient de la PAC (Politique Agraire Commune) et est allouée aux cultures herbacées (céréales, légumineuses) et aux surfaces fourragères. Quand il demande cette aide, l’agriculteur doit effectuer une déclaration des parcelles agricoles en précisant la culture et la surface qu’il va destiner au semis à l’occasion de cette campagne.

Nombre d’exploitations, surtout celles qui ont à payer un bail pour la location de terres, seraient déficitaires sans les aides de la PAC, ce qui donne lieu à une situation de dépendance auparavant inconnue. La contrepartie en est le contrôle rigoureux que subit l’agriculteur, assujetti aux règlements administratifs sous peine de recevoir une sanction. Il existe une grande différence entre la relative liberté dont jouissait l’agriculteur au cours des décennies précédentes et le contrôle sur les cultures qu’il subit maintenant, puisque quasiment toute son activité se trouve réglementée.

Arracheuse de betteraves. Argandoña (A), 2003. Fuente: Juan José Galdos, Grupos Etniker Euskalerria.

Par exemple, actuellement, tous les agriculteurs sont tenus de laisser une partie de leurs terres en jachère ou d’incorporer des cultures protéiques qui apportent de l’azote au sol, comme les légumineuses, ce pourquoi ils reçoivent une prime spécifique au titre du verdissement, qui s’ajoute à l’aide générale pour toutes les cultures. Toutes les exploitations de plus de 15 hectares doivent réserver au minimum 5 % du total des terres arables à des surfaces d’intérêt écologique : jachère, cultures fixatrices d’azote, reboisement et/ou agrosylviculture. En outre, pour diversifier les cultures, la PAC oblige les exploitations inférieures à 30 hectares à pratiquer au moins deux cultures différentes, la culture principale devant occuper moins de 75 % du total ; et les exploitations de plus de 30 hectares à semer trois cultures différentes, les deux principales devant occuper moins de 95 % et la plus importante d’entre elles moins de 75 % du total.

Pour toutes les cultures, l’agriculteur est contraint de tenir à jour un “cahier des charges” dans lequel il indique tous les travaux qu’il réalise dans les champs, comme la préparation de la terre, l’ensemencement, les traitements, la récolte, l’achat de produits, la vente des grains recueillis, etc. ; ce cahier peut faire à tout moment l’objet d’une inspection par les autorités compétentes.

Quant au degré de complexité qu’atteignent les différentes administrations, il est visible dans la prolixité des législations qu’elles promeuvent et dans le jargon compliqué auquel sont confrontés les agriculteurs. Prenons par exemple ce paragraphe dans lequel est expliqué comment sera réalisée l’opération techniquement appelée “convergence” de la dernière réforme de la PAC, qui couvre la seconde moitié de la présente décennie:

Cosechadora automotriz de cereal. Argandoña (A), 2003. Fuente: Juan José Galdos, Grupos Etniker Euskalerria.
Application of herbicides in lettuce. Argandoña (A), 2003. Fuente: Juan José Galdos, Grupos Etniker Euskalerria.

“En outre il convient de tenir compte du fait que la valeur provisoire des DPU qui vous sont maintenant reconnus est affectée par la convergence, autrement dit, un rapprochement progressif des DPU initiaux vers le DPB régional moyen va se produire par 5 marches identiques de 2015 à 2019. Dans le cas où la valeur de vos DPU se situerait en dessous de 90 % du DPB moyen de votre région, ils connaitront une aug mentation progressive pour atteindre en 2019 la hausse correspondant au tiers de l’écart entre votre moyenne et 90 % de la moyenne de la région. En revanche, si vos DPU se situent au-dessus de la moyenne de la région, ils financeront cette convergence à travers la réduction de la valeur des DPB qui auront en 2019 une valeur supérieure à la moyenne, bien qu’avec une réduction maximale de 30 % de leur valeur nominale. Si, après le calcul de la convergence à la hausse, vos DPU se situent en 2019 en dessous de 60 % de la moyenne de la région, ils atteindront en 2019 ce 60 % de la moyenne, sauf si cela suppose des pertes aux contributeurs supérieures à 30 %, auquel cas ils tendront vers 60 %, mais sans les atteindre. Enfin, si vos DPU ont une valeur comprise entre 90 % et la moyenne de la région, ils ne seront pas affectés par ce processus de convergence”[2].

Le poids économique de l’activité agraire dans l’ensemble de la société est toujours moindre. Ceci se traduit à son tour par un éloignement progressif du monde urbain par rapport à l’activité productrice d’aliments avec ce que cela suppose. Pour nombre de gens, il est maintenant normal de trouver certains fruits et légumes dans les magasins d’alimentation pendant les mois d’hiver, puisqu’ils ne sont même pas conscients de la saisonnalité des cultures.

Et en même temps nous assistons au paradoxe suivant : plus le poids de l’activité agraire diminue, plus se renforce un intérêt social pour assister aux foires agricoles où sont proposées les productions locales, au point que certaines d’entre elles sont devenues de véritables manifestations de masse, comme les foires de Santo Tomás à Bilbao et à Donostia ou le dernier lundi d’octobre à Gernika. Dans ces foires et d’autres de moindre renommée nous observons un phénomène croissant de folklorisation et de standardisation visible dans l’alignement de stands identiques parrainés par les Caisses d’épargne.

De même, de nombreuses foires “monographiques” centrées sur un certain produit local par lequel est connu un village ou une zone sont organisées à des fins promotionnelles. Leur finalité va bien au-delà de la diffusion de ce produit puisqu’elles représentent un facteur supplémentaire d’attraction touristique tout en poussant à la consommation dans les établissements du secteur services.

Les administrations développent des campagnes de soutien à certaines cultures au moyen d’aides qui vont du conseil technique au soutien financier à coups de subventions. Un nombre variable de producteurs en bénéficient. Quand les aides cessent, certaines de ces cultures perdurent et d’autres disparaissent complètement ou deviennent marginales. Sur le versant atlantique, tel est le cas du kiwi, dont la culture se maintient, ou de la poire de la variété conférence, dont la culture a été abandonnée.

Signalons aussi que parallèlement au recul du nombre de personnes qui se consacrent à l’activité agraire, les regroupements de producteurs de tout type prolifèrent et les organigrammes de l’administration en rapport avec cette activité se complexifient.

Zizel-goldearekin goldaketan. Argandoña (A), 2003. Fuente: Juan José Galdos, Grupos Etniker Euskalerria.

L’autosuffisance alimentaire a reculé dans le monde rural à un tel degré que même chez les producteurs agricoles la part des aliments achetés sur le marché en provenance de l’industrie agroalimentaire est centrale. Le poids de la production locale dans l’alimentation des zones urbaines est pratiquement testimonial. De plus, nous pouvons observer un éloignement croissant des lieux de production des aliments consommés. En réaction, des campagnes de sensibilisation sont organisées en direction des consommateurs qui mettent l’accent sur l’importance des produits locaux et certaines organisations agraires défendent des concepts comme la souveraineté dite alimentaire.

Le fait est que la préoccupation sociale grandit autour de tout ce qui est lié à la nourriture, comme ses conditions de production, et bien que les intéressés ne représentent encore qu’un petit pourcentage de la population, ils ouvrent un espace aux formes de production éloignées de celles qu’a standardisées l’industrie et plus proches des pratiques traditionnelles que nous décrivons dans ce volume.

Quelques considérations sous un angle ethnographique

Notre société rurale s’est effondrée en quelques décennies, de même que dans la majeure partie de l’Europe communautaire et industrielle. Dans notre cas, surtout sur le versant atlantique et aux alentours des grandes villes sur le versant méditerranéen, il s’est produit un énorme développement industriel, urbain et de voies de communication qui a provoqué (et qui continue à provoquer) l’occupation des meilleures terres agricoles et surtout des rares plaines alluviales.

La concurrence qui se crée autour de la terre complique l’accès des jeunes à cette activité, ou à de nouvelles terres pour ceux qui s’y consacrent déjà mais ont besoin d’augmenter leurs surfaces agricoles, car ceux qui veulent en acheter avec l’intention de les urbaniser peuvent payer un prix beaucoup plus élevée pour elle.

Le standard de vie et de comportement est désormais celui du monde urbain, dont la mentalité et la vision du monde sont complètement neuves. Les gens de la campagne qui autrefois émigraient vers les usines emportaient avec eux leur mentalité rurale, mais aujourd’hui, dans un retour de pendule complet, les gens des villes qui reviennent à la campagne ou qui y débarquent pour la première fois le font avec une vision urbaine de la vie. Et comme si cela ne suffisait pas, nos propres administrations légifèrent selon une vision uniformisatrice dans laquelle prévalent ces traits. C’est peut-être ceci qui est le plus difficile à comprendre pour une société aussi fortement urbanisée et industrialisée que la nôtre, le fait que le processus de changement non seulement s’est répandu sur une bonne partie du territoire, mais aussi qu’il a profondément modifié la mentalité de ceux qui vivaient dans le monde rural. C’est cela qui a été appelé “modernisation”. Mais quel que soit le nom qui est donné à ce phénomène de profondes transformations, s’il est indéniable que nombre d’entre elles ont été positives, surtout en ce qui concerne les services de base comme l’eau courante et l’électricité, les routes et l’accès aux communications, il a aussi entraîné une importante perte au niveau des valeurs qui caractérisaient le milieu rural.

La primauté du monde urbain sur le monde rural trouve son reflet symbolique dans la tendance du premier à appeler “sol” ce que le deuxième appelait “terre”.

Il nous faut garder à l’esprit que l’agriculture bien comprise est une façon d’être au monde profondément liée à la terre et à la vie et que ce n’est pas un hasard si le même verbe cultiver s’utilise tant pour la culture de la terre que pour la culture de soi.

Dans une certaine mesure, le processus de modernisation de l’activité agricole a été un miroir aux alouettes. Un mirage né du principe que les formes traditionnelles de travail étaient obsolètes et qu’il fallait en développer d’autres plus “compétitives”. Personne n’a semblé remarquer que la société rurale fondait sa stratégie de survie sur la solidarité entre voisins et que la compétitivité lui était quelque peu étrangère. Le résultat a été, dans le meilleur des cas, des villages dont les habitants ont abandonné l’activité agraire, avec un agriculteur qui a loué ou acheté les terres de tous et qui, chargé de machines et parfois de dettes, produit autant ou plus que ce tout ce qu’ils obtenaient ensemble, d’une façon progressivement plus intensive et industrialisée. Toujours plus éloigné mentalement de ses propres voisins, il envisage son avenir avec l’incertitude toujours présente de sa survie comme producteur.

Aujourd’hui, le savoir appliqué à l’agriculture est de nature technique. Mais n’oublions pas que ce savoir est parfois mis en avant par des intérêts commerciaux plus ou moins discrets dont l’ambition est de créer de nouveaux modèles d’affaire. Les agriculteurs qui s’opposent aux modèles intensifs et industrialisés ne se nourrissent pas seulement des savoirs traditionnels locaux. Le même réseau d’information mondial qui permet le transfert des techniques de pointe de l’agro-industrie rend possible l’accès à de multiples connaissances et expériences paysannes liées à l’agriculture familiale.

Les producteurs ruraux ont été parmi les premiers à souffrir de la mondialisation économique et de la rupture des marchés locaux qu’elle a entraînée. Il n’est donc pas étonnant que leur réaction d’opposition ait été mondiale, mais à la différence de la tendance uniformisatrice des marchés économiques et de l’agro-industrie, ils aspirent au respect de la diversité des cultures, dans les deux sens du terme.

L’augmentation de la taille des exploitations agricoles est parallèle à celle du nombre de personnes qui abandonnent l’activité agraire devant sa complexité croissante, sa faible rentabilité et le manque de descendants désireux de prendre la relève quand elles arriveront à l’âge de la retraite. Mais cela ne veut pas dire qu’elles renoncent définitivement au travail de la terre, puisque habituellement elles continuent à produire des aliments pour la maison dans un potager ou une parcelle attenante. Sur le versant atlantique, le phénomène a été similaire, mais avec l’élevage, et nombreux sont ceux qui continent à cultiver un potager.

Pendant les périodes de prospérité économique, cette activité horticole recule, car l’effort qu’exige ce travail ne compense pas les possibilités d’acheter des aliments variés, mais quand des époques de crise économique surviennent, la production domestique de nourriture se réactive pour compenser la chute des revenus familiaux.

Lors des crises, il se produit également un retour aux activités agraires de la part de ceux qui les avaient abandonnées pour des secteurs plus rentables, mais qui résistent moins bien aux périodes de déclin économique. En ce sens la terre a toujours signifié une garantie de survie.

Ces derniers temps ont vu se produire une incorporation à l’activité agraire de jeunes avec un lien familial lointain, ou sans aucun lien, avec la terre. Ils ne peuvent pas accéder à une activité agraire professionnelle telle qu’elle existe aujourd’hui, car l’accès à la terre est très difficile pour eux et cela demande en outre des investissements financiers si importants qu’ils sont hors de leur portée. Ils se rabattent donc sur des activités horticoles avec lesquelles ils se suffisent et dégagent un excédent à vendre sur les marchés locaux. En général, cette activité productrice est pratiquée avec des techniques relevant de l’agriculture biologique.

Une autre raison qui pousse les gens disposant de terre à cultiver leurs propres aliments est celle de “savoir ce qu’ils mangent”, autrement dit, de contrôler dans la mesure du possible la production des aliments qu’ils consomment face au doute croissant que suscitent les méthodes employées par l’agro-industrie.

En ce sens, nous observons des mouvements pendulaires au cours desquels sont récupérées des pratiques anciennes, mais logiquement adaptées aux temps modernes. Quand à la fin des années 1980 nous avons conclu le premier tome de l’Atlas consacré à l’alimentation domestique, l’élaboration du pain à la maison avait déjà été abandonnée. La fabrication de cet aliment a connu depuis un processus d’“industrialisation” progressif qui, à côté de la baisse de son prix, a entraîné une importante perte de qualité. En réaction, ces dernières années nous pouvons observer une résurgence de l’élaboration artisanale de pain, avec des farines très proches de celles utilisés autrefois et le recours à la vieille pratique du levain.

À la périphérie de quelques communes à caractère urbain, des espaces potagers ont été aménagés, avec toutes les conditions nécessaires pour pouvoir les cultiver, et sont attribués aux personnes intéressés. Il s’agit là de la version contrôlée et ordonnée d’une tendance qui a toujours existé aux alentours des villes et des grands noyaux de population, de mise en valeur de friches abandonnées comme parcelles de culture, en générale par des gens qui eux-mêmes avaient émigré de la campagne. Les propres communes, même celles importantes, ont compté dans le passé des potagers où étaient cultivés des produits d’autoconsommation et leur souvenir reste d’ailleurs présent dans la toponymie et le nom de certaines rues.

En définitive, nous vivons un temps de profondes mutations. Les jours de l’agriculture traditionnelle ici décrite, pour une bonne part conservée uniquement dans la mémoire de nos informateurs les plus âgés, sont comptés. C’est une agriculture professionnalisée, toujours plus intensive et industrialisée, et plus dépendante d’aléas politiques et économiques survenant très loin des terres de culture, qui survit. Mais à juger par les mouvements qui se résistent à considérer que tout est perdu, il ne semble pas que cette activité, ce mode de vie si lié à notre histoire et à notre territoire, va s’éteindre. Puisse ce volume apporter le témoignage que nos paysans et leurs ancêtres ont connu et pratiqué une agriculture dont l’échelle était plus humaine, avec une vision plus holistique qui prenait en compte, non seulement le rendement, mais aussi un réseau complexe de facteurs physiques et d’êtres vivants plongés dans une activité en définitive enracinée dans la culture de cette vie qui nous donne notre nourriture.

  1. Ces changements sont traités dans un tome antérieur de cet Atlas consacré à la maison et à la famille en Vasconia.
  2. Paragraphe extrait d’un courrier adressé aux producteurs de la Communauté Autonome Basque par la Direction de l’agriculture et de l’élevage du département Développement Économique et Compétitivité du Gouvernement basque en 2015.