IV. SORTIE DES COUCHES

De Atlas Etnográfico de Vasconia
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Prescriptions pendant les relevailles

Pendant le temps qui s’écoulait entre l’accouchement et l’entrée rituelle dans l’église, l’accouchée devait rester recluse dans sa maison et n’avait même pas l’obligation d’assister à la messe le dimanche et les fêtes de précepte.

L’origine de cette coutume est de nature religieuse, puisque selon la loi mosaïque, la femme venant d’avoir un enfant était impure et ne devait toucher aucune chose sainte ni aller au temple jusqu’à la fin d’une période de quarante jours de purification (Lévitique, 12, 2-8).

Se protéger avec la tuile

Pendant cette période de réclusion, si la femme se voyait contrainte de sortir de la maison, pour étendre le linge, ramasser du bois ou aller au jardin ou au bercail, elle devait le faire avec la tête couverte d’une tuile prise du propre toit, et la conserver ainsi jusqu’à revenir à la maison.

Cette pratique antique est le reflet d’une mentalité selon laquelle le tout est représenté par la partie, dans ce cas la maison par le toit et celui-ci par la tuile, de sorte que tant que la femme reste sous la tuile elle ne viole pas la prescription qui lui interdit de sortir de la maison.

Bénédiction de la mère

La femme qui venait de donner le jour recevait une bénédiction spéciale avant d’entrer dans l’église pour la première fois après l’accouchement. Ce rite est reconnu comme une pratique habituelle dans tous les villages étudiés ; toutefois, il n’existait aucun précepte ecclésiastique qui y oblige, le Rituel romain se référant à lui comme à une coutume "pieuse et louable".

Selon les enquêtes, la bénédiction post partum a cessé d’être pratiquée dans les années soixante. C’est à cette époque qu’est entré en vigueur dans les paroisses le nouveau rituel de baptême incorporant la bénédiction de la mère et du père à la suite de la cérémonie du baptême de l’enfant.

La Purification de la Vierge comme archétype

Dans diverses enquêtes, les informateurs relient expressément cette coutume au geste réalisé par la Vierge Marie en présentant son enfant, Jésus, au temple de Jérusalem à l’issue de la période de purification (Luc, 2, 22).

À Amézaga de Zuya et à Gamboa (A), on dit que cette cérémonie se pratiquait à l’imitation de la Vierge Marie et en effet elle était appelée "la présentation de l’enfant "; avec elle, l’accouchée s’efforçait de reproduire le comportement de la Vierge.

Durée de la quarantaine

Dans de nombreux villages étudiés, les gens se rappellent que l’accouchée attendait que s’écoulent quarante jours après l’accouchement avant de se rendre à l’église pour recevoir la bénédiction.

Toutefois, selon les mêmes enquêtes, cette période de référence religieuse[1] s’est raccourcie au fil du temps pour s’adapter aux besoins pratiques de la parturiente.

Rite d’entrée dans l’église

Cette section offre plusieurs descriptions locales sur l’entrée à l’église après la période de purification de la femme récemment accouchée. Bien que cette coutume ait cessé d’être pratiquée depuis une trentaine d’années, les détails de la cérémonie sont encore très présents dans le souvenir de nos informatrices.

À Abadiano (B), le rite, elixan sartzie, avait lieu au bout de deux ou trois semaines après la naissance de l’enfant, quand la mère s’était rétablie. Pour s’assurer qu’elle avait assez de force para affronter le trajet de la maison à l’église avec l’enfant, elle le prenait dans ses bras et faisait une ou deux fois le tour de la maison ou du jardin, parfois en compagnie d’une voisine. Quand ils arrivaient à la porte de l’église, le curé venait à leur rencontre et récitait une prière. La mère prenait d’une main l’étole et, portant l’enfant dans les bras et un cierge, elle entrait dans l’église, où la cérémonie se terminait par la bénédiction.

La visite de l’accouchée et la célébration de la sortie des couches

Les célébrations liées à la naissance avaient pour centre la parturiente, ume egin berria. Celle-ci était récompensée par des visites et des cadeaux que lui apportaient ses parentes, sœurs, belles-sœurs et tantes, ainsi que ses voisines et ses amies. Quand elle se rétablissait, elle leur offrait en retour un goûter ou un repas qui, autrefois, réunissait les femmes qui étaient intervenues dans l’accouchement et qui avaient apporté un cadeau. Plusieurs enquêtes relèvent que cette célébration était plus importante que celle correspondant au baptême et que ses participants étaient principalement des femmes. Elle avait lieu lors des relevailles et recevait les noms d’ermakariak, martopilak et atsolorra.

Elle a été constatée principalement au Gipuzkoa, mais aussi en Biscaye et dans le nord de la Navarre. En revanche, dans les villages étudiés pour l’Alava, personne ne mentionne un banquet après le rétablissement de la mère.

Offrandes des enfants dans chapelles et sanctuaires

Comme il a été indiqué précédemment, les mères avaient pour habitude de se rendre avec leur enfant à l’église paroissiale pour effectuer la présentation de ce dernier. Parfois aussi elles se rendaient dans le même but dans une chapelle ou un sanctuaire demander la protection de la Vierge ou des saints et présenter des offrandes.

À Artziniega (A), elles allaient avec l’enfant à la chapelle San Antonio le 14 juin et au sanctuaire de la Encina le premier mercredi de Pentecôte. À Hondarribia (G), certaines mères avaient coutume d’offrir le bébé à la Vierge de Guadalupe, sainte patronne de la ville. À Artajona (N), elles portaient leur enfant à la Vierge de Jérusalem pour qu’elle le protège.


  1. Cette période de quarante jours trouve son expression dans le calendrier religieux ; il s’agit de la période qui s’étend entre la Nativité du Seigneur, le 25décembre, et la fête de la Purification de la Vierge, le 2 février, appelée populairement la Chandeleur.