XI. BOISSONS
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L’eau
Jusqu’au milieu de ce siècle, l’eau de la fontaine, iturriko ura, était la boisson la plus communément consommée dans la vie quotidienne de la famille. On faisait en sorte que cette eau soit « fraîche », c’est-à-dire récemment rapportée de la source ou de la fontaine.
Avant l’installation de l’eau courante dans les maisons, ce transport d’eau pour le déjeuner ou le dîner était en général confié aux enfants et aux jeunes de la famille qui, équipés de récipients, se rendaient à une source proche ou à la fontaine du village. Ces endroits étaient donc des lieux de rencontre quotidiens.
Pendant le repas, tous buvaient du même pichet, pitxarra, yarroa, ou de la gargoulette, potixe, dans lequel avait été apportée l’eau de la fontaine.
D’autres récipients utilisés pour le transport d’eau étaient la herrada (Carranza-B et Monreal-N), la ferreta et le cántaro, pegarra (Iparralde)(cruche) ou la caldera et la cantina. Dans certains villages, comme Zeanuri (B), ils ressentaient une certaine appréhension face aux récipients borgnes comme la gargoulette.
À Mélida (N), le système de transport habituel quand les hommes partaient à la Bardena était la gargoulette, rallo, remplie d’eau. Ils emportaient aussi, quand ils partaient pour longtemps, des amphores de terre remplies d’eau avec du vinaigre et du sucre.
L’appréciation ressentie pour l’eau de certaines sources locales est une constante dans les estimations populaires d’antan. Qu’elles soient « de hierro », urgorri ou metalure (ferrugineuses) ou calcaires, hatxure, ces eaux constituaient un motif d’orgueil, surtout face aux étrangers.
Par contre, les sources d’ « eau dure », ur gordin, ur gogor n’étaient pas estimées. On rangeait dans cette catégorie les eaux qui n’avaient pas suffisamment couru sous terre. Les sources préférées étaient celles où l’eau jaillissait à température constante, fraîche en été et non froide en hiver.
Nous verrons plus tard que le vin a été, jusqu’au milieu du siècle actuel, une boisson extraordinaire à caractère festif. Quoi qu’il en soit, dans les repas ordinaires le vin était réservé aux hommes. Les femmes et les enfants buvaient habituellement de l’eau ou, parfois, un peu de vin dilué dans de l’eau. Plus tardivement, l’eau de seltz ou la gaseosa, également appelée limonada a fait son apparition pour la mélanger au vin.
Parmi les prescriptions populaires sur l’ingestion d’eau, nous en citerons deux très répandues : il n’est pas sain de boire d’eau fraîche en étant en sueur ou haletant ; boire de l’eau après avoir mangé des fruits comme des cerises ou des prunes provoque de la diarrhée.
Une pratique autrefois très fréquente consistait à dire « Jesus! » avant de boire de l’eau. Ceci se disait surtout quand on buvait entre les repas.
Le vin. Ardoa
Consommation
Le vin a été et reste la boisson alcoolique la plus consommée, tant à la maison que dans les établissements publics, bien au-dessus de toute autre.
Comme chacun sait, il existe trois variétés principales de vin de table, qui sont le rouge, le blanc et le rosé, le premier étant le plus consommé et le deuxième réservé à l’heure de l’apéritif ou au poisson du repas en fonction des préférences.
Selon la région dont il s’agit, il existe des préférences de consommation pour un certain type de vin qui se maintiennent en termes de graduation, saveur, acidité et autres caractéristiques particulières que les buveurs savent apprécier. Mais quoi qu’il en soit, au cours des dernières décennies une modification des goûts a été constaté : les vins puissants et fortement titrés (15-16 degrés) ont laissé place aux vins plus légers et doux au palais qui contiennent moins d’alcool (12-13 degrés). Nous parlons ici de la consommation générale, sans entrer dans les détails que peuvent apporter les grands dégustateurs en termes de vin à boire en fonction des plats du repas.
Txakolina. Le chacoli
Par comparaison avec le vin de table courant, le txakoli est à titre alcoolique moyen et plus acide.
Il doit ces deux propriétés principalement aux caractéristiques climatiques des régions où se trouvent les vignes pour son élaboration, à ensoleillement moindre et plus haut degré d’humidité.
Il y a cent ou deux cent ans, quand le txakoli était élaboré dans beaucoup plus de villages qu’aujourd’hui, sa consommation était domestique. De nos jours, il se boit presque exclusivement en apéritif dans les bars et les sociétés gastronomiques.
Dans les fermes, tant que durait le txakoli on n’achetait pas de vin pour la consommation ordinaire.
Dans certaines localités, il existait des fermes qui réservait une partie de la récolte pour la vente, mais dans la ferme même, à l’instar de cidreries. Ces lieux étaient appelés txakoliña. Il existe encore des fermes qui maintiennent cette pratique.
Ces établissements n’ouvraient pas leurs portes en même temps dans le même village, mais l’un après l’autre au fur et à mesure que les réserves de chacun s’épuisaient. Chacun d’eux restait ouvert environ quinze jours en partant de la Saint-Joseph, au printemps.
Pour faire savoir que le txakolin était ouvert, ils plaçaient une branche de laurier sur la porte de la ferme ou sur un poteau fiché devant elle, et installaient à l’entrée une longue table flanquée de bancs pour que les buveurs puissent s’assoir.
Sagardoa. Le cidre
Le cidre est une boisson rafraîchissante, légèrement alcoolique, issue de la fermentation du jus de pomme. Il se boit à température fraîche et non pas froide.
Comme c’était le cas du txakoli, la plupart des fermes qui élaboraient autrefois du cidre le destinaient à la consommation familiale, mais il existait dans chaque village une ou plusieurs qui, sous le nom de cidrerie, sagardotegia, ouvraient leurs portes aux voisins désireux de le déguster, accompagné d’un plat ou d’un repas que préparait l’etxekoandre.
Tout le long du premier tiers de ce siècle les cidreries où a été conservée, dans une grande mesure, le goût pour le bersolarismo, étaient réputées. Très souvent aussi on pouvait y jouer aux quilles.
La consommation de cidre était principalement limitée à la partie nord du pays, soit la totalité des vallées de Bizkaia, Gipuzkoa et Iparralde, la partie nord de l’Álava et le nord-ouest de la Navarre.
Liqueurs
Jusqu’à il y a une cinquantaine d’année, la consommation de liqueurs se faisait selon deux modalités bien différenciées ; l'une consistait à boire un petit verre pour faciliter la digestion après un repas copieux et riche en calories. Comme ceci ne survenait qu'à quelques rares occasions au cours de l'année, nous pouvons dire qu'il s'agissait là d'une consommation sporadique ; et l'autre comme tonifiant corporel à l’aube, avant de commencer les travaux des champs.