XII. LE TABAC

De Atlas Etnográfico de Vasconia
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L’initiation à l’habitude de fumer

Traditionnellement, un jeune était autorisé à fumer à la maison et devant son père après avoir fait son service militaire. Bien que ce cas-là ait été le plus généralisé, l'autorisation était parfois donnée à partir de dix-huit ans.

Dans certains villages d’Álava (Bernedo, San Román de San Millán, Apodaca, Apellániz), il était admis qu’un jeune commence à fumer en entrant dans une bande de copains ou en devenant mozo, ce qui survenait vers les 18 ans, quand il commençait à sortir le dimanche du village pour aller aux bals et aux fêtes extérieures et à collaborer à l'organisation de la fête patronale et celle de Santa Águeda. À son entrée dans la bande, les autres jeunes lui exigeaient quelques quarts de vin et ce jour-là, le mozo fumait un cigare.

Un jeune commence à fumer devant son père quand celui-ci l’y autorise et la coutume veut qu'il lui offre une cigarette.

On commence à fumer pour faire le grand et pour vouloir ressembler ou imiter les adultes. Actuellement, l’âge à partir duquel il est permis qu’un jeune fume est descendu et en général il s’initie à partir de 15 ans.

Toutefois, comme nous l'avons déjà signalé, le fait de fumer a toujours commencé avant d'obtenir cette autorisation paternelle, mais on le faisait en cachette. Avant, il était fréquent de fumer des succédanés de tabac et, plus récemment, d'acheter des cigarettes à l'unité dans un magasin, qui était partagée entre les membres du groupe pour en tirer un parti maximum. Quand quelqu’un fume une cigarette seul, il est abordé par ses amis qui lui réclament la pibi ou le mégot dont ils tirent encore quelques bouffées.

Les adultes se sont toujours sentis dans l'obligation de gronder l'enfant surpris en train de fumer, mais aujourd’hui, en dehors de ses parents et de parents proches, personne ne lui dit rien.

Même si les parents ont toujours été conscients de fait que leurs enfants fumaient en cachette, l'autorisation pour le faire était retardée jusqu'aux âges indiqués plus haut.

Les jeunes filles et les femmes ne fumaient jamais et il était mal vu qu’elles le fassent. Dans une certaine mesure, fumer était considéré comme un signe de masculinité. Toutefois, les filles s'initiaient aussi parfois à cette habitude, comme leurs camarades de jeu, avec des succédanés du tabac, pour l'abandonner ensuite.

À partir des années cinquante, cette coutume a peu à peu gagné les femmes et le pourcentage de fumeuses a progressivement augmenté. En général, les filles commencent par fumer du tabac blond avant de passer au brun, qui est moins cher. Les femmes fument rarement des cigares ou la pipe. Actuellement, les filles commencent à fumer en cachette au même âge que les garçons.

Succédanés du tabac

Jusqu’à ce que le tabac devienne un produit courant, et plus souvent aux époques de cherté, les feuilles et les tiges de diverses espèces végétales ont été fumées. Si elles n'étaient pas ramassées sèches, il fallait les soumettre à un séchage, puis parfois elles étaient déchiquetées à à la main.

Parmi les plantes qui ont été mises à profit pour remplacer le tabac, signalons une plante grimpante dont la tige sèche, très poreuse, facilite son emploi comme cigarette, avec le seul inconvénient que la fumée qu’elle dégage cause une légère irritation. Le fait de fumer les tiges de cette plante était une activité plus propre aux enfants dans leurs moments de jeu qu'aux adultes.

Les feuilles de patate, patatorria ont également été fumées. Après les avoir laissé sécher, on les frottait entre les mains pour bien les défaire. Pour les fumer, on les mélangeait habituellement avec un peu de tabac.

On utilisait aussi les stigmates ou barbes du maïs, artobizarrak, arrivés à maturité, ou après les avoir laissé sécher à l'air au grenier. On les broyait avant de les utiliser.

La coutume de rouler ces succédanés du tabac dans des bractées sèches ou les feuilles de l’épi de maïs quand le papier à cigarette manquait, était très répandue. Les bractées utilisées étaient les plus fines proches des grains.

Culture et élaboration domestique du tabac

Autrefois, pour essayer de pallier la pénurie, dans certains villages on a planté du tabac dans le potager familial avec plus ou moins de succès. En général, ce semis a eu un caractère expérimental et comme on ignorait tout du processus de transformation postérieur, le produit final était de mauvaise qualité et cette culture a peu à peu été abandonnée. Ces tentatives sont apparues aux époques de grande pénurie, soit dans l’après-guerre et avec le rationnement qui a suivi la dernière guerre civile. Toutefois, cette culture a aussi été expérimentée dans certaines zones en correspondance avec des périodes de pénurie sur le marché.