III. LES GUÉRISSEURS

De Atlas Etnográfico de Vasconia
Aller à : navigation, rechercher

Autres langues :
Inglés • ‎Español • ‎Euskera • ‎Francés

Le présent chapitre traite deux aspects liés entre eux : d’un côté, qui consulte-t-on ou à qui a-t-on recours en cas de maladie, et de l’autre, les remèdes ou les médecines qui sont conservés normalement à la maison. En ce qui concerne le premier sujet, selon les informations recueillies dans les localités étudiées, parfois les gens allaient voir d'abord le médecin et d'autres le guérisseur, ce dernier jouissant d'un grand prestige pour tous les problèmes d'os. Le cas d'autres personnes ayant exercé des pratiques curatives est également abordé. Les remèdes qui sont conservés à la maison sont, soit des plantes cultivées dans le potager familial ou ramassées dans la campagne, soit des produits achetés en pharmacie.

Les guérisseurs

Les guérisseurs, sasimedikuak

Barriola distingue entre les guérisseurs classiques, très enracinés localement, qui s'occupent de traiter tout ce qui se présente à eux, les spécialistes des potions et des onguents, avec ou sans formules magiques, ou de remèdes complémentaires, et ceux qui se consacrent, pas exclusivement mais le plus souvent, à traiter les os cassés, les contractures, les dislocations et autres blessures diverses[1]. Nous maintenons cette même distinction dans notre travail.

Le même auteur signale qu'au sein de la vaste gamme de guérisseurs des deux sexes les gens ont coutume de les distinguer par un nom particulier en fonction de la spécialité qui est la leur. Ainsi, il existe les spécialistes des emplâtres, errezu-egileak, s'ils soignent avec des prières, les ziñatzaileak, s'ils font le signe de croix ou conjurent, et les petrikiloak, de façon générale s'ils traitent les os[2].

Barriola remarque que le phénomène des guérisseurs est profondément enraciné et que le recours à ces praticiens est en quelque sorte la dernière issue pour ceux qui n'ont pas trouvé remède à leurs maux dans la science. Ceci est confirmé par le retour en grâce des plantes et la vogue de la médecine naturiste et des méthodes suggestives, fondement de la pratique guérisseuse ancienne et nouveau visage de la pratique moderne. Avec des prétentions plus ou moins scientifiques, tant les pratiques des guérisseurs que la foi en leur efficacité, survivront[3].

Personnes qui exercent des pratiques curatives

Dans de nombreuses localités, surtout en habitat concentré, il a été signalé que depuis longtemps ils ont un médecin dans le village et qu'ils avaient donc l'habitude de le voir en premier quand un membre de la famille avait beaucoup de fièvre ou quand ils étaient effrayés par les symptômes que présentait le mal.

À Abadiano (B) s'il s'agissait de blessures, les gens allaient voir l'infirmier, puis le médecin en cas de maladie et comme ultime remède. Pour atteindre les fermes éloignées, le médecin utilisait autrefois le cheval comme moyen de transport, puis le vélo et la moto jusqu'à l'arrivée de la voiture. Autrefois, il était très courant que le médecin visite le malade à la maison, mais aujourd'hui, sauf s'il lui est impossible de se déplacer ou s'il est alité, c'est le patient qui va voir le médecin.

Médecines conservées à la maison

Les médecines qui, en général, sont gardées à la maison dans ce qui a été appelé l'“armoire à pharmacie” nous indiquent quels ont été et quels sont les besoins les plus pressants dans la vie ordinaire. Comme nous allons le voir par la suite à partir des informations recueillies, il existait toujours à portée de main un remède pour les petites blessures survenues au cours des tâches domestiques et agricoles, des bandages pour les coups, un onguent pour les brûlures et les gerçures de la peau, des feuilles de certaines plantes pour faire des inhalations, d'autres pour préparer des infusions en cas de maux d'estomac et de problèmes de constipation, et guère plus. D'autre part, une petite parcelle du potager domestique était réservée à la culture de certaines plantes destinées à des fins thérapeutiques, tandis que d'autres produits horticoles à usage culinaire pouvaient aussi avoir une application médicinale. Finalement, d'autres plantes et herbes médicinales se ramassaient dans la campagne ou à la montagne, à l'époque où elles apparaissaient, pour ensuite les sécher, las garder au grenier et les utiliser selon les besoins.

Plantes médicinales cultivées

Voici un échantillon de plantes médicinales et de plantes destinées à couvrir les besoins alimentaires, mais également utilisées pour soigner, qui ont été cultivées ou qui le sont dans le potager familial.

À Agurain (A), on cultivait de l'orge, du maïs, de l'absinthe, de la rue, du romarin et du persil. À Amézaga de Zuya (A), du persil pour les maux de l'ouïe et des dents, tant du persil que des géraniums pour stopper les hémorragies, et de l'oignon pour les blessures. À Apodaca (A), de la bourrache, du romarin, de la menthe et des roses.

Herbes médicinales ramassées dans la campagne ou en montagne

Pour cette section, nous avons pris comme exemple l'information de Moreda (A). Dans ce village, ils cueillent dans les champs, où elles poussent spontanément sur tout le territoire de la commune, principalement sur les berges des cours d'eau et au flanc de la montagne, les plantes suivantes : ail, cardon, oignon, prêle, chiendent, lavande, eucalyptus, feuilles d'olivier et de noyer, picride fausse épervière, guimauve, mauve, camomille, menthe, pommes de terre, racines de cannes et joncs, romarin, son, sauge, thé, tilleul, thym, orties, violettes et sureau hièlbe (yiebo). Les onguents, sirops et breuvages maison sont préparés avec de l'huile locale et toutes sortes d'ingrédients : eau, ammoniaque, moût cuit, soufre mélangé à du saindoux, bicarbonate, café, arum ou irrigation, laine de brebis, lait, eau de Javel, huile de serpent, moutarde, pansements Sor Virginia, sulfate de magnésium, saumure, orcanette, vin, bandages, ventouses et iode.


  1. Ignacio Mª BARRIOLA. El curandero Petrequillo. Salamanca: 1983 p. 13
  2. Idem, La medicina popular en el País Vasco, op. cit., p. 127. Cet ouvrage consacre un chapitre à quelques-uns des guérisseurs célèbres du Gipuzkoa, tels qu'Arnobate, Masa-Martin, Petriquillo, Sakabi et Trukuman. Cf. pp. 135-151
  3. BARRIOLA, El curandero Petrequillo, op. cit., p. 41.